''Il vaut mieux se perdre dans la passion que de perdre sa passion''




vendredi 10 décembre 2021

Rester humble et respectueux. Ici et ailleurs.


Ma Scott 6'0'' #2 et quelques sedges maison en CDC et poils de chevreuil

Que ce soit à la Petite-Sarine, sur le Doubs ou non loin d’ici sur un torrent de montagne. Sur les contreforts des alpes Juliennes en Slovénie, dans le Triglav à braver les puissantes eaux limpides et bleutées sur fond de gravier blanc de la Soca. Ou encore dans l’univers magique et tranquille au milieu de la plaine karstique de Planina au bord de l’Unica, l’engouement que j’ai à vouloir lancer une mouche sur la surface de l’eau est à chaque fois identique. Je dirais de cet engouement qu’il est devenu plutôt humble. Oui c’est cela, plutôt humble. Je suis devenu humble par ce qu’au fil des ans, j’ai appris à connaitre mes limites et mes faiblesses face à l’aspect terriblement impondérable de la pêche à la ligne. Ce n’est pas que je sois dans le doute sur mes capacités de pouvoir leurrer les poissons mais simplement pour que cela puisse se réaliser, il y a au préalable un nombre relativement élevé de paramètres qui doivent converger avant de pouvoir prétendre capturer quoi que ce soit. Dès lors, se posent immanquablement quelques questions. Premièrement, y’a-t-il des poissons dans cette rivière? Et s’il y en a, sont-ils en activité? Y’a-t-il des insectes en émergence? Est-ce que l’eau a une température idéale? La rivière n’est-elle pas trop haute ou au contraire trop basse et chaude ? Ai-je la bonne imitation et est-ce que je la présente bien? Mon fil est-il suffisamment solide et n’ai-je pas de nœuds sur ma pointe? N’y a-t-il pas trop de vent et est-ce que mon approche est silencieuse? Et enfin, n’aurais-je simplement pas la scoumoune comme invitée de dernière minute? Cela en fait des choses qui nécessitent de l’expérience et de la maitrise pour éventuellement glisser une créature de l’univers aquatique dans l’épuisette! A la fin, tout cela force également au respect car bien souvent le hasard s'en mêle et transforme la prise en offrande.

C'était la première de la saison en sèche

Montage de quelques mouches CDC pour le Doubs en début de saison

Simon et une jolie zébrée en sèche

L'offrande de la rivière

Simon en pleine action sur un beau pool du Doubs

Arnaud sur un beau courant au Pré-d'en-Bas

Lucien sur un torrent de montagne rive gauche de la Sarine

Fôret riveraine au printemps à la Neirigue

Un coin juste magnifique à 10 minutes de la maison...

Frédéric tente sa chance sur une truite difficile

Il y avait quelques truites qui mouchaient plus en amont!

Keep them wet!

Les sous-bois au bord de la Petite-Sarine

L'ail des ours en fleur

Dans un tout autre registre et ceci depuis quelques années, je me suis rendu compte que l’acoustique d’une rivière est devenue importante pour moi. On a souvent tendance à dire que le cadre d’une rivière est magnifique lorsque sa morphologie est encore naturelle si possible dans un écrin forestier ou campagnard et loin des infrastructures humaines qui pourraient enlaidir le panorama. J’ai régulièrement privilégié ces cadres de pêche ici et ailleurs et mes voyages en Alaska par exemple m’ont amené certaines fois très loin de toute civilisation humaine. Mais depuis quelques temps, je me suis rendu compte que le paysage sonore d’une rivière ou d’un lieu de pêche a une grande importance et une influence non négligeable sur ma perception, sur mon positionnement de pêcheur dans l’environnement où il m’arrive de progresser. Ce paysage sonore se modifie sans cesse au fil de l’eau. Qu’on aille amont ou aval, que la rivière soit rapide ou lente et parsemée d’obstacles ou pas, le son ou plutôt la voix de la rivière change. Qu’on s’éloigne des berges et qu’on rentre dans la forêt riveraine et voici que le chant des oiseaux ou le bruissement du vent dans les feuilles des arbres deviennent à nouveau perceptible. Tout cela créé un ensemble sonore qui m'entoure et qui contribue grandement à stimuler les sens de manière bienfaisante et à la réussite d'une partie de pêche. Au contraire, un endroit sujet au bruit d’origine humaine, moto, voiture, avion et j’en passe, me perturbe même si ce site est beau et propice à la pêche car il est entrecoupé de phases discordantes et défavorables à la méditation ainsi qu'à la contemplation des lieux.

Une belle Marmorata en sèche sur le Trophy Zone de l'upper Idrijca

Alain sur un gobage. Prendra ou prendra pas?

Le résultat: une belle truite sur une imitation d'éphémères numéro 18!

Catch and Release!

Une arc sur le Trophy Zone sur bas de ligne 10/100. Un truc de ouf!

Magnifique Soca dans le parc du Triglav

Une belle Marmorata de la Soca en sèche sur Branko Killer numéro 10!

The famous Soca trout (Salmo Marmoratus)

Une perle de rivière: l'Unica!

Un magnifique ombre des Balkans de l'Unica

Un méandre silencieux de plus dans la plaine karstique de Planina

J’ai eu à nouveau l’occasion de me rendre plein de fois à la rivière cette année et même si la météo ne fut pas la meilleure pour la mouche en raison des longues périodes d’intempéries ce printemps et durant une partie de l’été, j’y ai passé de magnifiques moments. De beaux poissons, ici et aussi en Slovénie cet automne. Merci mère nature pour ta générosité ! Par la même occasion, j’aimerais vous remercier, vous mes potes de pêche qui sans vous, cette passion ne serait pas partagée. C’est sympa de faire le pêcheur solitaire mais quel plaisir aussi de pouvoir se raconter des histoires incroyables et de passer des bons moments ensemble au bord de l’eau grâce à ce fil rouge qu’est notre passion commune ! Alors merci les amis et je vous dis à l’année prochaine pour de nouvelles aventures sur notre terrain de jeu favori ! Je vous mets quelques photos, mon ''Best of 2021'' pour vous donner de bonnes raisons de vous impatienter pour la prochaine saison! 😉

Angelo

Coprin chevelu (Comprinus comatus) en bordure de rivière

Dernière partie de pêche de la saison sur un torrent de montagne

Une petite merveille de la nature

Selfie avec ma nouvelle casquette Simms!

Ce qu'il reste de ma mouche après une partie de pêche fructueuse!



mercredi 11 novembre 2020

Les pieds dans l'eau à domicile


Simon au Moulin du Plain
C’est toujours un peu la même chose en fin de saison. Il faut se rendre à l’évidence, les semaines et les mois sont passés à nouveau trop vite. Eh oui, le temps ne s’arrête pas et les saisons du pêcheur à la mouche défilent les unes après les autres. Il y a comme une amertume qui se fait ressentir face à l’observation des arbres qui environnent les rivières. Leurs belles feuilles au vert neuf se sont parées maintenant de couleurs automnales et bientôt elles tomberont toutes au sol. Les éclosions sont devenues plus éparses et les éphémères, encore présentes certains jours en grand nombre, sont plus petites en fin de saison. Les belles soirées à n’en plus finir des mois de mai et de juin ne sont, déjà, plus qu’un lointain souvenir.

Un bel ombre du Doubs Franco-Suisse à Goumois
Je pense à tout cela et il y a une petite rivière qui me vient à l’esprit et qui coule non loin de chez moi. Elle est particulièrement saisissante durant le printemps. Pour y parvenir, on dirait qu’il faut franchir une jungle tellement la végétation est encombrée par endroit et aux abords de certains méandres. L’accès n’y est pas très difficile mais il faut avoir le courage de se glisser littéralement dans les sous-bois et franchir les branches, les hautes herbes, orties et impatientes de l’Himalaya en espérant de ne pas tomber sur un nid de tique.
Le Doubs à Goumois
Un jolie zébrée prise en sèche et aussitôt remise à l'eau
La rivière est basse en ce mois de septembre
A chaque fois que je m’y rends, j’ai l’impression de partir à l’aventure. Le jeu en vaut la chandelle car les truites perdent leur méfiance lorsque le soleil se couche et que l’obscurité de la nuit envahie l’atmosphère et que les premières mouches de mai et autres Ecdyonurus affaiblies par leurs ébats nuptiaux effleurent la surface de l’eau. Leur comportement lucifuge s’estompe et les dernières lueurs du soleil ne peuvent plus les inquiéter. Elles sortent de leur repère et elles gobent à la lueur de la lune qui se reflète sur la surface de l’eau. C’est à dix minutes de voiture de chez moi. S’il y a une chose que la pandémie m’a enseigné cette année, c’est qu’avant, je ne me rendais pas compte de la chance énorme d’avoir pu voyager dans cette quête insatiable des salmonidés comme je l’ai fait durant de nombreuses années.

La rivière dans son écrin de verdure
Magnifiques couleurs
Un imago de mouche de mai sur mon moulinet après avoir décroché une truite
Le ciel s'obscurcie et bientôt les truites sortiront de leur repères
La jungle. Gare aux tiques!!!
Une demoiselle
Là-bas, plus loin, il y a des truites!
Enfin si, je m’en rendais compte mais pas autant que maintenant. Cette avidité m’a amené au milieu de nulle part dans des endroits sans âme qui vive, là où la nature n’a que peu souffert de la présence humaine. Aujourd’hui, tout est bloqué et cela à l’air un peu con à dire comme ça mais quand je regarde l’état de certaines rivières avec les poissons qu’il n’y a plus dedans, je me dis qu’on aurait mieux fait d’en prendre plus soin car finalement, le bonheur de la pêche à la mouche peut simplement être à dix minutes de la maison et pas nécessairement à des milliers de kilomètres du domicile. Quand on dit bêtement que la proximité est une richesse et que c’est une pandémie qui vient froidement nous le rappeler… C’est fou quand même : quand on pense que la plupart des rivières que nous avons dans les parages sont tellement polluées et devenues stériles qu’elles ne permettraient même plus ne serait-ce qu’à une famille de se nourrir. Donc cette année, il a bien fallu accepter la situation et se résoudre à prospecter les cours d’eau des alentours et, à ma grande surprise, je ne fus pas toujours déçu bien au contraire.

Magnifique Torneresse
Pascal
Les spots se succèdent et n'en finissent pas
Une habitante des lieux sur un sédge CDC et poils de chevreuil
Le selfie au bord de l'eau!
La progression n'est pas aisée
Il fallait s’y attendre, mon voyage dans l’ouest américain fut annulé et cet été à la place d’aller pêcher la Yellowstone dans le Montana, je suis allé sur le Doubs dans le Jura. A la place de la Lamar et ses beaux méandres, je suis allé sur la Broye et j’ai troqué la Pebble Creek pour la Torneresse. Je me suis baladé à n’en plus pouvoir sur nos torrents là-haut sur la montagne et le plaisir, même s’il y avait des hauts et des bas comme il y en a toujours à la pêche, était au rendez-vous. Bien sûr, nos écosystèmes aquatiques sont en grande partie perturbés et on ne compte plus les kilomètres de linéaire qui ne valent plus le déplacement et c’est vraiment dommage.
Flou de bougé artistique
Un coin perdu
Avec de magnifiques poissons
Les pieds dans l'eau à domicile!
C’est bien connu, les rivières sont malades de l’homme mais il y a tout ici pour être à la hauteur des destinations lointaines et prisées. Alors que faire ? Eh bien prenons soins de notre belle nature et engageons-nous pour la protection de nos rivières ! C’est sûr, elles nous le rendront bien. C’est notre patrimoine, ne l’oublions pas ne serait-ce que pour les générations futures de pêcheurs et autres amoureux de la nature. Faisons-en sorte que la biodiversité ne soit pas uniquement un mot à la mode mais un mot chargé d’espoir et une réalité pérenne, ici, à domicile. Préservons, protégeons, engageons-nous dans les clubs et associations qui militent pour nos cours d’eau et s’il le faut renaturons ces écosystèmes afin que nous puissions à nouveau admirer la faune qui vie grâce à ces milieux uniques. Que la résignation et la persuasion que le gazon est plus vert ailleurs cessent et revendiquons la proximité. C’est tout simplement la plus grande richesse que nous avons.

Angelo Apperti