Le Javroz sous la neige et la glace à la hauteur de la Valsainte |
C'est
plus fort que lui. Cela fait des jours que la pression devient de plus en plus
forte. La météo clémente lui renforce cette sensation qu'il devient imminent et
inéluctable de se rendre au bord de l'eau.
Dans l'imaginaire passionné du
pêcheur à la mouche, le temps presse et ne pas aller fréquenter ses rivières
préférées, c'est véritablement perdre son temps à faire des choses qui lui
semble inutiles voir même futiles.
C'est en tout cas valable pour moi. La
convergence des idées qui me dirigent à me rendre à la rivière me semble être
une évidence totalement dépourvue d'arrière-pensées et qu'importe ce que mon
entourage puisse en endurer. Les pulsions de ma passion prennent le dessus et
me donnent à chaque fois raison lorsque j'abandonne les miens ainsi que les
impératifs de mon quotidien.
Culpabiliser
sur cet état de fait me passe à peine à l'esprit. Je pars. Je laisse tout
derrière moi et je voyage non seulement physiquement mais aussi spirituellement
dans un monde qui lie mon imaginaire à celui absolument merveilleux de la
rivière. Je me sauve. Toutes les tracasseries de la vie peuvent aller se faire
foutre, elles attendront. La nature est pour moi comme un refuge sûr et tranquille.
Au bord de l'eau, la brise légère me caresse gentiment les cheveux et ceci me
rappel avec une nostalgie certaine ces moments de tendresse lorsque enfant je
posais ma tête sur les jambes de ma maman pour me faire câliner.
L'odeur
humide si particulière de la rivière, doux mélange d'herbes, d'algues et de
feuilles humides se mélange à la fraîcheur ambiante et m'enveloppe d'un parfum
tonifiant. Le gazouillis des oiseaux perchés dans les arbres environnants se
mêle aux bruissements des flots et fini de m'emporter dans la rêverie. Sans que
je ne m'en aperçoive vraiment, je me suis doucement introduit dans un monde
extraordinaire qui fusionne avec mon imagination.
Les
rayons du soleil qui se reflètent sur l'eau brillent de milles éclats dans mes
yeux et en regardant les méandres de la rivière que je fréquente depuis
l'enfance, je me rappel un court instant de mes premiers jours passés sur ces
plages de galets en compagnie de mon père à suivre ses instructions. A apprendre patiemment avec lui le sens de l'eau pour enfin, un beau jour, me
connecter à une créature venue d'un autre monde. A l'époque, ce monde était une
chose totalement abstraite et mystérieuse. Je ne le savais pas encore mais ce jour
là fut le début d'une grande passion.
Je
réalise aujourd'hui malgré toutes ces années passées au bord de la rivière que
mes yeux ont toujours ce regard pur car chaque nouvelle saison ne se ressemble
pas et apporte avec bonheur son lot d'improvisation. Cela peut sembler
angoissant de prime abords mais ce manque d'assurance est indispensable. En
fait ce renouvellement et ce côté irrationnel que l'on ne peut contrôler est pour
moi l'essence même de l'appel à chaque fois surprenant et magique de la
rivière. Bientôt l'ouverture. Passion quand tu nous tiens! C'est enfantin et
pourtant à chaque fois si délicieux...
Angelo